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Le nom Simard serait d’origine wisigothe et, depuis très longtemps, on associe ceux qui le portent à la ville française d’Angoulême. L’abbé Paul Médéric, ayant mené d’exhaustives recherches en France, a été en mesure de remonter la lignée jusqu’à Antoine, arrière-grand-père de Pierre Simard immigrant à Québec avec son fils Noël.
Antoine Simard serait né, entre 1520 et 1540, à Puymoyen, petit village d’Aquitaine situé au sud d’Angoulême. Son arrière-petit-fils, Pierre, épouse, à l’âge de 28 ans vers 1631 à Angoulême, Catherine Boudier qui décède des suites de son premier accouchement. En décembre 1635, Pierre se remarie avec Suzanne Durand, fille de Louis et de Françoise Levreau, orpheline et domestique chez Benjamin Boquet d’Angoulême. Noël, fils de Pierre et de Suzanne, naît vers 1637 à Puymoyen.
Rabot de maçon, vers 1740. (Bibliothèque et Archives nationales du Québec, P178, D58)
Pierre, père de Noël et fils de Marsault et d’Ozanne Souillet, désire apprendre le métier de maçon, car son frère aîné, Marsault, fils, reprend le domaine familial. Vers 1616-1620, Pierre se rend à Angoulême, où le travail abonde, car il faut reconstruire après la dernière guerre de religion.
Suzanne, mère de Noël et épouse de Pierre, vient d’une famille d’artisans de la construction, comme son mari. Pierre et Noël Simard pratiquent le métier de maçon en France et, dans la colonie, ils travaillent la pierre, la brique n’y étant pas utilisée à ce moment. Parfois, le maçon et le tailleur de pierre effectuent le même travail : tailler et façonner les pierres, puis les poser au mortier.
Ancien outil de maçon, vers 1740. (Bibliothèque et Archives nationales du Québec, P178, D65)
Pierre et Noël portent déjà le surnom de Lombrette à leur arrivée à Québec. Des trois origines possibles du surnom, celle qui semble la plus plausible se rapporte à la « bretture » que les tailleurs de pierre et les maçons utilisaient. « Lombrette » serait une contraction de « longue brette », signifiant que le coup du bras du maçon sur la pierre pour la rayer est énergique. Les deux autres possibilités sont en rapport soit avec un lieu-dit peut-être disparu de la mémoire collective, soit avec la petite taille de Simard qui aurait projeté une « ombrette ».
Le Cap Tourmente, 1893. (Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 0002726645).
Au milieu des années 1650, il est difficile de bien gagner sa vie autour d’Angoulême. Après mûre réflexion, les Simard répondent à l’appel des recruteurs pour la Nouvelle-France.
Pierre entreprend la traversée en compagnie de son fils Noël en laissant derrière lui sa femme, Suzanne, et sa fille, aussi prénommée Suzanne. Ils arrivent à Québec le 21 juin 1657 sur le navire Le Taureau affrété par le marchand-armateur François Perron de La Rochelle. Ils trouvent rapidement du travail et s’installent à Château-Richer. Leur premier contrat est octroyé par Étienne de Lessard, alors connu pour ses grandes propriétés terriennes, dont L’Isle-aux-Coudres.
L’été de leur arrivée, Pierre et Noël obtiennent une concession au Petit-Cap, dans la seigneurie de Beaupré. Leur terre se trouve entre celles de Pierre Gibouin, maçon comme eux, et de Robert Paré. En 1658, grâce à Étienne Lessard, ils œuvrent comme maçons à la construction de la première église de Sainte-Anne-de-Beaupré.
En 1666, Noël et son père décident d’acheter la terre de leur voisin Gibouin. Pour concrétiser leur projet, ils empruntent 1 500 livres à monseigneur de Laval, qui détient la majorité des parts de la seigneurie de Beaupré. La relation de confiance entre les Simard et François de Laval se développe et il leur confie plusieurs mandats. Avec d’autres, les Simard jouent un rôle de premier plan dans le développement du bout de la seigneurie de Beaupré, à Baie-Saint-Paul.
Suzanne Durand, épouse de Pierre Simard, ne fait jamais la traversée et nous ignorons ce qu’il advient d’elle après le départ de son mari et de son fils, Noël. Un acte notarié, daté d’octobre 1666, indique qu’elle se croit veuve et qu’elle lègue tous ses biens à celle qui l’héberge dans sa retraite.
En 1661, Noël Simard dit Lombrette épouse Madeleine Racine, fille d’Étienne Racine et de Marguerite Martin, fille de Marguerite Langlois et d’Abraham Martin, deuxième Européen à fonder une famille dans la colonie. À cette occasion, Pierre Simard donne tous ses biens à son fils Noël. Le don est assorti de certaines conditions, dont celle de verser une dot à sa sœur Suzanne qu’ils attendent à Québec comme la mère de Noël, également prénommée Suzanne.
Carte de la Baye Saint-Paul. De coüagne, 1749. (Bibliothèque nationale de France, collection Gallica)
Les ancêtres Pierre et son fils Noël Simard, rencontrant certaines difficultés financières, François de Laval leur offre, en novembre 1677, un bail pour développer le secteur Baie-Saint-Paul dans sa seigneurie de Beaupré. Enceinte, Madeleine Racine, épouse de Noël, demeure à Sainte-Anne-de-Beaupré durant l’été 1678 pendant que les hommes préparent la terre de Baie-Saint-Paul. Elle les rejoint au printemps 1680. Le 2 mai 1681, leur fille Rosalie devient la première personne à recevoir le sacrement de baptême à Baie-Saint-Paul. La marraine de Rosalie, Louise Gagné, femme de Claude Bouchard de Petite-Rivière-Saint-François, est la seule femme pouvant jouer ce rôle.
La famille habite sur la ferme de la seigneurie jusqu’en 1695. Le 25 octobre 1698, Noël reçoit une concession à Petite-Rivière-Saint-François, entre le Gros Cap Maillard et Grande Pointe, du côté ouest (amont) du village. Il n’y habite jamais.
Noël et Madeleine ont 14 enfants atteignant l’âge adulte. Les quatre premiers naissent à Château-Richer entre 1663 et 1669. La famille déménage à Sainte-Anne-de-Beaupré où naissent quatre autres enfants.
Noël et Madeleine sont les ancêtres de tous les Simard d’Amérique. Les descendants de leurs fils essaiment partout dans Charlevoix et au Saguenay. Les deux fils aînés épousent des sœurs Dodier tandis que les deux autres épousent des sœurs Paré. Une des filles épouse Pierre Tremblay, seigneur des Éboulements, deux autres filles épousent des frères Bouchard de Petite-Rivière et enfin un fils épouse une sœur de ces mêmes frères Bouchard.
Pierre Simard décède après le recensement de 1681 dans lequel on précise qu’il est voisin de Pierre Tremblay.
Joseph, Ludger et Édouard, fils du capitaine Jos Simard et de Cédulie Tremblay de Baie-Saint-Paul, laissent leur marque dans plusieurs domaines. Leur grand-père Arsène Simard est le premier navigateur de la famille. Pour être capitaine, il fallait savoir lire, écrire et compter.
Joseph Simard, juin 1956. (Bibliothèque et Archives nationales du Québec, P795, S1, D4443, Fonds Gabriel Desmarais [Gaby])
En 1917, l’aîné, Joseph Simard, alors âgé de 29 ans, achète, avec deux associés, les Chantiers Manseau de Sorel pour 15 000 $. Il s’agit d’une petite entreprise fondée en 1898 par messieurs Robidoux et Manseau sur la rive gauche du Richelieu, à l’emplacement des futurs chantiers de Marine Industries Limited. L’entreprise se spécialise dans les navires de bois.
Dans les années 1920, Joseph Simard diversifie et modernise la compagnie en ajoutant des opérations de dragage, d’entretien et de réparation de navires. En 1926, après l’obtention d’un contrat pour le dragage de l’Anse-aux-Foulons à Québec, Joseph s’associe à une entreprise de Vancouver. En 1927, son frère Édouard, de huit ans son cadet, se joint à l’entreprise à titre de directeur général. Édouard est le père d’Andrée, épouse de l’ancien premier ministre du Québec, Robert Bourassa.
À partir de 1928, Joseph Simard et ses associés forment une nouvelle entreprise et diversifient les activités par acquisition : fonderie, chaudronnerie, construction, réparation et dragage navals. En 1929, à la mort d’un de ses deux associés initiaux, l’autre se retire et Joseph Simard devient seul actionnaire des cinq compagnies actives. Il procède à leur fusion sous le nom de The Consolidated Marine Companies Limited que dirige son frère Édouard.
Édouard Simard, janvier 1942. (Bibliothèque et Archives nationales du Québec, P833, S1, D1611)
En 1931, Ludger arrive à Sorel en provenance de Baie-Saint-Paul. En 1937, la compagnie de Joseph achète les chantiers navals du gouvernement fédéral à Sorel. Les Simard possèdent alors une immense flotte de dragues. Le complexe industriel, déjà prospère, connaît un essor remarquable durant la Deuxième Guerre : livraison de 30 Liberty Ships de 10 000 tonnes, corvettes, dragueurs de mines, barges d’invasion, pétroliers-ravitailleurs… 6 000 employés se relaient 24 heures sur 24, encadrés par des techniciens et des ingénieurs fraîchement diplômés, comme cette classe complète de l’École polytechnique de 1942 engagée par Marine Industries Limited.
Après la guerre, Marine Industries Limited doit congédier 3 000 employés ; en 1947, il en reste 200. La construction de traversiers et d’un brise-glace favorise la reprise. En 1953, le clairvoyant Ludger Simard oriente la compagnie vers la construction de wagons de chemin de fer. En 1965, la Société générale de financement du Québec (SGF) acquiert 60 % des actions de Marine Industries Limited ; le président, Ludger Simard, seul survivant des frères Simard fondateurs, et les héritiers se partagent le reste.
En 1978, la SGF devient propriétaire à part entière de Marine Industries Limited. Après un investissement de redressement, en 1981, la SGF vend 35 % des actions à Alsthom Atlantique de France. Une longue grève porte un très dur coup à la société et la construction maritime prend fin en 1991, alors que GEC Alsthom est propriétaire à part entière de l’entreprise.
Fridolin Simard, décembre 1956. (Bibliothèque et Archives nationales du Québec, P795, S1, D4587, Fonds Gabriel Desmarais [Gaby])
Fridolin Simard, originaire de Saint-Urbain, naît en 1910. Sa famille s’y établit au départ de Baie-Saint-Paul, vers la fin du XVIIIe siècle.
Fridolin et son frère Thomas-Louis ouvrent un garage et une station-service à Amos, en Abitibi, en 1932. Trois ans plus tard, ils créent l’entreprise de construction Simard et Frères. Le gouvernement du Québec leur confie la réalisation d’axes routiers, de ponts et d’édifices publics. Par hasard à la fin des années 1930, Fridolin découvre le domaine de l’Estérel qui appartient alors à un noble français, le baron Louis Empain. Épris du site, il l’achète et agrandit le domaine en acquérant les terres voisines.
En 1939, Fridolin est élu maire d’Amos, devenant, à l’âge de 29 ans, le plus jeune maire du pays. Il devient plus tard président de l’Union des municipalités du Québec, ce qui lui permet de côtoyer des urbanistes, des architectes et des spécialistes du monde municipal. Fridolin et son frère Thomas-Louis embauchent l’urbaniste Jean-Claude La Haye réputé être le « père de l’urbanisme » dans la province. Le tandem Simard-La Haye participe à la réalisation de l’Expo 67.
Cyril Simard, 2005. (Ordre national du Québec)
Cyril Simard descend de François Simard et Ursule Paré. Fils de Lionel et d’Adrienne Fortin, Cyril est originaire de Baie-Saint-Paul. Après des études classiques au Séminaire de Québec, il obtient un baccalauréat en architecture de l’Université de Montréal puis une maîtrise en aménagement et design. En 1986, il complète un doctorat en histoire de l’Université Laval.
Jeune architecte, il fait ses premières armes comme concepteur du village canadien à Terres des hommes (Exposition universelle de 1967). De 1972 à 1977, il occupe le poste d’administrateur délégué de la Centrale d’artisanat puis celui de directeur des Arts visuels au ministère des Affaires culturelles.
À titre de directeur de la planification et du développement du Musée du Québec, il conçoit l’agrandissement du musée. En 1988, il devient président de la Commission des biens culturels du Québec. Cyril Simard est considéré comme étant le père de l’économuséologie, concept élaboré grâce à l’inspiration de Félix-Antoine Savard.
Le Colonel de Salaberry à Châteauguay, 1813. (Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 0005259668)
Après le déclenchement des hostilités entre les Américains et la Grande-Bretagne en 1812, le gouverneur ordonne aux colonels de milice de lever 2 000 hommes afin de former quatre bataillons de « milice incorporée » à l’armée régulière.
Le colonel Malcom Fraser reçoit à La Malbaie l’ordre le 25 mai. Il procède à un tirage au sort de 35 noms pour fournir le quota de la milice sédentaire de Baie-Saint-Paul (c’est-à-dire de tout Charlevoix), qui est de 35 hommes. Certains tirés au sort changent de place avec d’autres, ce qui semble permis, probablement avec l’assentiment du capitaine local. En janvier, un ordre supplémentaire est donné pour que la milice de Baie-Saint-Paul trouve 116 hommes de plus.
Deux Simard de la milice sédentaire de Baie-Saint-Paul sont mobilisés dans Charlevoix : Thimothé, fils de Denis de Baie-Saint-Paul, et Ulric, fils de Godefroy de Baie-Saint-Paul. Thimothé et Ulric sont affectés à titre de soldats des 1eret 3e Bataillons de la milice d’élite incorporée, respectivement.
Le 26 octobre 1813, la milice d’élite incorporée se trouve à Châteauguay pour affronter une force d’invasion américaine. Le jour de la bataille, le 3e Bataillon s’est battu toute la journée et le 1er Bataillon, gardé en réserve, a pris la relève à la fin de la journée, après un repli temporaire de l’ennemi. Le 1er a contribué à repousser la dernière attaque américaine durant la nuit et n’a subi aucune perte parmi ses 70 hommes. Le 3e Bataillon compte 50 hommes. C’est une compagnie légère. À la fin de la bataille, deux soldats sont tués ; six hommes et un capitaine sont blessés tandis que quatre manquent à l’appel. Les deux miliciens Simard s’en sortent indemnes.
À titre de vétérans mobilisés, Thimothé et Ulric ont eu droit à la gratification consentie par le parlement de l’époque. Ils ont reçu 20 dollars en 1875 ; ils avaient alors 79 et 86 ans respectivement. Thimothé vivait à Baie-Saint-Paul et Ulric à Saint-Urbain. L’ancien député Pierre-Alexis Tremblay a intercédé en faveur d’Ulric Simard afin qu’il reçoive son dû.
Dès l’été 2024, vous pourrez vous procurer le livre Passeurs de mémoire au pays de Charlevoix , publié aux Éditions GID. Il sera en vente à la boutique du Musée de Charlevoix, sur le site Web de Parcours Fil Rouge ou en librairie.